Contre le recul du droit à la santé pour toutes et tous
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Vœu présenté au Gouvernement et aux parlementaires par le groupe des élu-es RCGE, lors du conseil municipal du 16 décembre 2019.

Début novembre, le gouvernement a annoncé des mesures visant à réduire l’accès aux soins des personnes étrangères vulnérables ce qui aura pour conséquence directe l’aggravation de leur précarisation.

Les demandeurs d’asile sont directement pris pour cible, alors qu’ils sont déjà, au moment de leur arrivée en France, dans une situation de fragilité physique et psychologique difficile : le gouvernement a en effet confirmé  qu’il envisageait d’instaurer un délai de carence de trois mois avant affiliation à la protection universelle maladie (Puma). Il faut bien comprendre que cette mesure va avoir des conséquences importantes : cela va aggraver l’état de santé des personnes et entrainer des prises en charge, à un stade plus avancé et les amener automatiquement à fréquenter davantage les urgences, déjà  complètement saturées.

Dans le viseur du gouvernement également, l’aide médicale d’Etat (AME) dont bénéficiaient jusqu’alors les étrangèr-es sans papiers après 3 mois de résidence en France. Alors que ce système était déjà très complexe et entraînait un non recours important et donc de nombreux retards de soin,  le gouvernement s’apprête à le complexifier davantage. Au nom de la lutte contre les fraudes, la prise en charge de certains soins va être retardée, et les barrages administratifs renforcés. Là encore, avec comme effet direct la vulnérabilisation des personnes et une pression supplémentaire sur les PASS (Permanences d’Accès aux Soins), les hôpitaux, les travailleurs sociaux, les associations….A Grenoble la permanence du CASO (Centre d’Accueil de Soins et d’Orientations) de Médecins du Monde est déjà complètement surchargée par des personnes, le plus souvent exilé-es et en attente de bénéficier d’une prise en charge sanitaire dans le cadre du droit commun

Rappelons que l’AME ne représente qu’une part très faible du budget de l’assurance maladie : 0,5% du budget. Un budget particulièrement bien géré comme le montrent différents rapports de l’Inspection Générale des Affaires Sociales & de l’Inspection Générale des Finances.

En s’attaquant à ces systèmes, le Gouvernement va accroître le nombre de renoncements aux soins, déjà très importants chez ces personnes. Les conséquences seront dramatiques pour elles et pour la santé publique.

Réduire ou supprimer ces différents droits n’est pas motivé par une préoccupation budgétaire (compte-tenu du budget qu’ils représentent, et du coût supplémentaire pour la société du retard de soins). C’est une intention purement politique et dangereuse pour la santé de chacun et chacune d’entre nous. Baser cette décision sur une suspicion d’abus, serait une mauvaise foi manifeste.

Ces mesures s’inscrivent dans la droite ligne du virage  anti immigration déjà pris lors du vote de la loi Asile et Immigration. Rappelons que cette loi consacrait une logique sécuritaire et d’enfermement au détriment des droits fondamentaux (triplement de la durée légale de rétention pour les étrangers en situation irrégulière, allongement de la durée de retenue dans un commissariat pour vérification de droit au séjour de 16 à 24 heures, réduction des délais d’instruction des procédures de demande d’asile, réduction du délais d’appel à la Cour nationale du droit d’asile, obstacles à l’établissement de la filiation d’un enfant d’un parent étranger…)

Le droit à l’hébergement inconditionnel est déjà largement et régulièrement bafoué. Désormais c’est le droit à se soigner qui est attaqué.

Il s’agit d’un nouveau recul, ,  pour l’accès aux soins des étrangers. Et d’une nouvelle rupture avec la tradition d’asile en France, qui là encore stigmatise les migrants en généralisant la suspicion.

De manière générale, ces mesures ne permettront pas de répondre humainement et efficacement aux défis actuels des migrations, qui conjuguent des souffrances et des détresses auxquelles les gouvernements successifs ont fait le choix délibéré de tourner le dos malgré l’existence de textes et de lois protecteurs de ces populations en très grande fragilité .

Nous mêlons notre voix à celles des associations qui sont mobilisées pour permettre l’accès aux soins des personnes les plus fragiles,  et demandons au gouvernement de renoncer à ces mesures.

Le conseil municipal de Grenoble, réuni le 16 décembre 2019, demande

– au Gouvernement de renoncer à son projet d’instauration d’un délai de carence pour l’accès aux soins des demandeurs d’asile et de mise en place de nouvelles entraves à l’ouverture des droits AME pour les étrangers en situation irrégulière.

– Aux parlementaires de se mobiliser dès demain pour faire barrage à ce recul sans précédent pour l’accès aux soins de personnes vulnérables.